Le corps
Ce corps…Ton corps...
Notre corps que l’on porte, qui nous porte, qui est là, qui est présent, qui nous suit, qui nous accompagne.
Notre corps que l’on peut aimer, ou aimer un peu,
ou aimer seulement une partie,
ou aimer ce côté mais pas celui-ci,
aimer le bas mais pas le haut,
aimer le haut, mais pas le bas,
aimer peut-être le profil droit, mais pas le profil gauche …
Notre corps qui entend, qui écoute, qui perçoit, qui supporte nos mots...
Ce corps, notre corps, tellement présent, tellement là, et puis aussi tellement absent.
Pourtant on en parle !!! On lui parle ! On l’engueule !
On le voit ! On le sent ! Il a même une odeur, il a des sensations.
Il se manifeste ! Il est là, il se fait sentir !
Il est vivant !
Il y a tous ses ressentis,
tellement agréables, qui sont de ceux,
lorsque épuisés , on retrouve ce canapé moelleux qui fait comme une sensation de “huuum réconfort que c’est bon !”
La douleur, aussi, celle qui blesse, qui ouvre une cicatrice parce qu’on s’est blessé,
ou, parce qu’un autre corps que le notre nous a blessé.
Cette blessure cuisante qui fait comme un arrêt dans notre respiration,
comme un stop-arrêt sur image, rien n’est d’autre que cette intensité.
Il y a aussi le toucher, les caresses, ces amabilités pour notre corps,
offertes par nous-même , ou par d’autres que nous,
d’autres que nous, à l’extérieur de notre corps.
Il y a de ces sensations lorsque l’on est aimé, caressé, qui sont de l’ordre de l’indéfinissable.
Les caresses du soleil qui réchauffent notre dos,
le vent frais sur notre visage,
l’eau qui glisse sur nous, lorsque nous nageons, lorsque nous nous lavons....
Et puis, entendre !
Ecouter la pluie dehors, sur le toit de notre demeure,
entendre les voitures qui passent,
puis entendre cette voiture qui arrive sur nous à toute allure !
Oui, quel plaisir d’entendre !
L’effort aussi, lorsque le corps s’y essaye, parvient à ses fins,
et que whaouh ça fait tant de bien !
Le plaisir gustatif, avoir faim , se nourrir, déguster, lécher, savourer…
L’eau qui va dans notre bouche jusqu’à notre gorge, et puis,
huummm enfin on a bu , on s’est désaltéré….
Il y a les odeurs corporelles, notre propre odeur, qui peut parfois gêner,
ou être agréable , attirante.
Et puis ce dialogue, ce dialogue à vie, cette conversation avec lui,
continuelle, quotidienne, perpétuelle, à perpétuité….
Ce dialogue que l’on imagine comme un monologue destiné à celui qui est toujours là,
pour celui, notre corps,
qui accepte, qui reçoit, , qui accueille nos critiques,
nos jugements, nos injonctions …
Ce corps précieux, qui comme un confessionnal intarissable,
que l’on pense intouchable,
reçoit toutes nos indélicates censures, nos railleries les plus exigeantes,
sous notre examen les plus scrupuleux.
Alors, pourquoi ce matraquage de mots si durs à propos de notre propre corps…
Comment cette division,
ce rejet, ce détournement à propos de notre propre nous !
Notre soi-même…
Pourquoi ces calomnies incessantes, ou ces indifférences, à propos de celui qui nous accompagne,
qui comme un tonneau des Danaïdes nous embourrons encore et encore,
de nos mots qui créent ces maux, ces douleurs , ces retranchements, ces empêchements d’être ...
Hey ! Je te propose un jeu !
Un défi,
que tu peux garder intime et ne pas partager (tout le monde n’est pas encore prêt à ça….)
Un jeu, un défi ...
On change !
Oui ! On change !
Si on est capable de se dire des choses telles que :
“Je suis moche”, on peut aussi se dire : ``Je suis belle” à soi-même ?
Si on se dit : ``Je suis nul “ peut-on se dire haut et fort : Waouh je suis mais super génial !!!
Si on se répète : “Je n’aime pas mes pieds”, peut-on peut-être s’offrir de dire :
“J’adore mon dos ?”
"J'aime tellement chacun de mes doigts !”
”Vois-tu mon joli nez, qu’en dis-tu ?”
“J’ai des cheveux comme des ficelles mais j’adore mon ventre !
Mieux ! Mieux encore ! :
“Hey Hey ! Je suis beau !”
“Whaouh je suis fort !”
“J’aime mes dents ;-)”
“J’adore ma main ! J’adore mes deux mains !”
Se relier à son corps, c’est ne pas se délier de lui,
ce n’est pas se séparer, ce n’est pas partir, et le laisser là...
C’est être avec lui, dans ces mauvais moments où on a tendance à le rejeter…
Être en lien avec lui, avec sa propre chair, son propre moi-physique,
c’est aimer,
clamer que l’on l’aime au même titre que l’on crie, que l’on répète sans pudeur,
avec indécence,
que l’on ne l’aime pas….
Dire, crier, clamer, chanter même que tu es trop grosse, que tu es moche,
que tu es vieux !!!!
Ok, c’est ok, c’est d’accord, bien sûr, c’est d’accord…
Bien sûr, on peut, on a le droit, on peut s’autoriser à le faire...On peut même le faire...
Mais chanter, que tu es belle, que là vraiment tes yeux sont magnifiques,
que ton bras droit est vraiment un joli bras droit et que dire de tes coudes !
Vois-tu tes jolis coudes ?
Vois-tu ce magnifique endroit qui est ta hanche ?
L’amour, l’amour, c’est aimer même quand on n’aime pas…
L’amour c’est aimer ses pieds qu’on n'aime pas.
Ce n’est pas se forcer, non, c’est aimer comme on aime la beauté dans l’imperfection, ou l’imperfection dans la beauté.
C’est dire : “Oui” à cette verrue :
“Tu n’es pas belle pour moi, et en même temps, c’est d’accord, parce que tu es là,
que ta présence est, en mon corps” , fait partie de moi,
est de moi, de mon corps, en ce moment,
tu accompagnes ma vie, tu m’accompagnes dans ma vie.”
C’est lui dire, oui, tu as vraiment une sale tête, et je te trouve moche,
et en même temps, ok, t ‘es là, tu as quelque chose à me dire, et je suis ok pour que tu sois là, pour le moment, ou le temps qui sera...
C’est se dire : Whaouh mes ongles ce n’est pas vraiment des jolies perles,
ni des coquillages,
mais c’est mon corps, il m’accompagne, il vient avec moi, il vit avec moi,
et je suis d’accord avec ces ongles imparfaits.
C’est lire en son corps, combien cette peur pèse et combien,
notre dos, notre gorge nous le dis…
C’est déchiffrer cette douleur comme un hiéroglyphe, et l’écouter avec la plus grande douceur.
Parfois, ça ne sera pas ça, et même,
on ne comprendra pas cette douleur,
elle restera une écriture mystérieuse et indéchiffrable.
Mais elle sera là,
et l’accueillir comme quelque-chose intrinsèquement en nous,
faisant partie de nous -pour un moment- plutôt que de l'affronter , s’y opposer, la combattre...
Je t’encourage à tout cela.
Je te convie à jouer et à t’amuser.
A accueillir tous ces maux avec amour de toi,
tous ces maux qui sont là présents.
Ok, ils sont là, et c’est tellement dur, tellement difficile,
et non, ce n’est pas cool de ressentir cette douleur, cette laideur, cette mocheté, cette maladie, ce n’est pas cool, ce n’est pas cool du tout…
Pour autant, c’est ok, c’est d’accord, être ok pour ressentir cet inconfort ….
Et surtout, surtout, je t’invite à aimer , à lui dire , à dire à ton corps qui t’accompagne, haut et fort, ou tout bas dans ton intimité,
avec cette authenticité effrontée :
“Je t’aime !!! Tu es beau et je t’aime !”
ou, si cela est meilleur pour toi :
Merci d’être en ma compagnie, pour ce moment de vie.
Car sais-tu ?...
Tu sais ?...
Ton corps te croit sur parole...
Avec reconnaissance, et chaleur du coeur